Dix-neuf mois après avoir renversé Ali Bongo Ondimba par un coup d’État, le général Brice Clotaire Oligui Nguema a remporté l’élection présidentielle gabonaise avec 90,35 % des suffrages, selon les résultats provisoires annoncés dimanche par le ministère de l’Intérieur.
L’ancien chef de la Garde républicaine, longtemps discret et austère, a troqué son uniforme pour se présenter en « candidat du peuple » lors d’une campagne éclair marquée par des scènes inédites : rap, break dance et envolées lyriques. À 50 ans, il se lance dans un mandat de sept ans, à la tête d’un pays en quête de renouveau après 55 ans de règne de la famille Bongo.
« Je suis Brice Clotaire Oligui Nguema, j’ai renoncé à ma carrière militaire pour vous servir », a-t-il déclaré au cours d’un débat télévisé inédit diffusé sur la chaîne publique Gabon 24, quelques jours avant le scrutin.
Une campagne rythmée et stratégique
Porté par sa plateforme « Rassemblement des Bâtisseurs », Oligui a sillonné le pays au pas de course, mettant l’accent sur la jeunesse et la relance économique. Ses meetings ont attiré des foules enthousiastes, galvanisées par ses promesses de réforme et son style direct.
« Nous sommes venus pour construire le pays, pour avancer », a-t-il lancé lors d’un déplacement dans le centre du Gabon.
Sa déclaration de candidature, faite le jour de son anniversaire, a été suivie d’un ton nouveau : plus accessible, plus proche du peuple, mais aussi plus engagé dans les grandes causes nationales, de la lutte contre la corruption à la promotion de la cohésion sociale.
Un bilan de transition contrasté
Depuis sa prise de pouvoir en août 2023, Oligui Nguema affirme que la transition a permis plus d’avancées en 19 mois que le régime précédent en plusieurs décennies. Toutefois, certains événements ont terni cette image : un jeune militaire mort sous la torture, des détentions arbitraires, ou encore des arrestations de jeunes pour violation du couvre-feu.
En décembre, il tente un geste d’apaisement en offrant 2 000 billets gratuits pour un concert populaire, tandis que son gouvernement promet davantage de transparence dans la gestion des finances publiques.
Une victoire contestée par l’opposition
Son principal adversaire, Alain-Claude Bilie By Nze, dénonce un scrutin verrouillé et une volonté de confisquer le pouvoir sous une nouvelle façade. Selon lui, l’ascension de Brice Oligui Nguema ne marque pas une rupture, mais une continuité déguisée du régime Bongo, dont il fut longtemps un pilier.
Un pays à reconstruire
Le nouveau président hérite d’un Gabon riche en pétrole mais miné par les inégalités, avec un taux de chômage des jeunes qui dépasse les 60 % en zone rurale, selon les chiffres officiels. Face aux espoirs suscités par sa candidature, il devra rapidement passer des promesses aux actes pour répondre à des attentes sociales très fortes.
« Le chef, c’est avant tout celui qui donne le ton », a-t-il rappelé samedi depuis le palais présidentiel.