Deux membres des forces de sécurité ont été, mercredi, frappés à mort lors d’une manifestation contre la vie chère à l’initiative d’un groupe de femmes à Freetown, la capitale de la Sierra Leone. Le gouvernement a annoncé d’instaurer un couvre-feu entre 15 h et 7 h du matin.

Des manifestations contre la vie chère en Sierra Leone ont tourné, mercredi 10 août, à l’émeute, à Freetown. Deux policiers ont été «frappés à mort par les manifestants» dans l’est de la capitale, a indiqué à l’AFP le porte-parole de la police Brima Kamara.

Un couvre-feu de 15 h à 7 h (locales, 17 h et 9 h à Paris) a été annoncé par le vice-président, qui a confirmé la mort de «Sierra-Léonais innocents, dont des membres des forces de sécurité».

Dans le quartier de Kissy, à l’Est de la capitale, des dizaines de jeunes manifestants ont lancé des pierres et des bâtons sur les forces de sécurité, qui ont riposté en tirant des gaz lacrymogènes, a constaté un journaliste de l’AFP. Plusieurs manifestants ont également affirmé à l’AFP que les forces de sécurité avaient tiré à balles réelles.

Certains d’entre eux scandaient «Bio doit partir», en référence au président Julius Maada Bio, au pouvoir depuis 2018, actuellement au Royaume-Uni en visite privée.

Des dizaines d’entre eux, blessés, étaient à l’hôpital Cannaught, selon un médecin de l’établissement joint par téléphone qui souhaite garder l’anonymat.

La police a également annoncé avoir arrêté des dizaines de manifestants.

Des manifestations sans autorisation ?

L’initiative de la manifestation est venue d’un groupe de femmes commerçantes – The Grassroots Women of Salone – qui a convoqué un «rassemblement pacifique» pour «attirer l’attention sur les difficultés économiques et les nombreux problèmes qui affectent les femmes de la Sierra Leone», selon une lettre adressée à l’inspecteur général de la police et consultée par l’AFP.

Le coordinateur de la sécurité nationale a nié, samedi, qu’une quelconque organisation ait demandé l’autorisation de manifester. 

Mardi, le gouvernement avait déclaré dans un communiqué qu’il avait ordonné à l’armée d’aider la police à gérer la «situation potentiellement instable en matière de sécurité (…) causée par les incitations répétées sur les réseaux sociaux (…) à se lancer dans des manifestations violentes dans tout le pays».

Internet a été coupé temporairement mercredi après-midi, a indiqué NetBlocks, un site basé à Londres qui surveille les blocages sur Internet à travers le monde.

Outre dans la capitale, les manifestations ont également eu lieu dans les villes de Makeni et Magburuka, dans le centre du pays.

Des violences condamnées

«Nous avons la responsabilité de protéger chaque citoyen de la Sierra Leone. Ce qui s’est passé aujourd’hui est malheureux et fera l’objet d’une enquête approfondie. J’exhorte tous les Sierra-Léonais à rester calmes», a déclaré le président Bio sur Twitter dans la soirée.

«Certains Sierra-Léonais égoïstes ont intensifié l’appel à la violence et au renversement par la force du gouvernement légitime», a de son côté fustigé le vice-président Mohamed Juldeh Jalloh à la télévision d’État.

De nombreuses ambassades et organisations internationales ont également réagi.

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a «fermement condamné les violences ayant conduit à des pertes en vie humaine». Elle appelle au «respect de la loi et à l’identification de leurs auteurs pour qu’ils soient présentés devant la justice», dans un tweet.

Babatunde Ahonsi, coordinateur des Nations unies dans le pays, a appelé «au calme et au dialogue». L’Union européenne, tout comme le Royaume-Uni, ont encouragé «toutes les parties à s’abstenir de recourir à la violence et à rester calmes».

Un pays touché par la guerre et les épidémies

France24